David Elkaïm, vous êtes auteur pour la télévision, le cinéma. Vous êtes notamment le créateur et co-scénariste de la série Arte Ainsi soient-ils, scénariste de la série En thérapie, qui vient de dépasser les 30 millions de vues sur arte.tv, ainsi que de la comédie romantique d’’anticipation Poissonsexe, sortie au cinéma en septembre 2020. Comment en êtes-vous venu à l’écriture de scénarios ?
J’ai commencé par une fac de cinéma – Paris 3-Censier – où j’ai fait une maîtrise sur « Laurel et Hardy » – avant de rentre à la FEMIS en scénario. En parallèle, et c’est ce qui m’a vraiment poussé, et obligé, à m’intéresser à la dramaturgie, j’ai écrit des spectacles pour enfants que je mettais en scène (et jouais) dans des Festivals, pendant l’été. Les enfants est un des publics les plus exigeant que je connaisse: si ça ne leur plaît pas, s’ils s’ennuient, ils ne font pas de cadeaux, ils se lèvent et ils se cassent, parfois en traversant la scène. A la FEMIS, j’ai proposé, pour mon projet de fin d’étude, d’écrire, une bible de série. C’était en 1996 : j’étais précurseur, mais ma directrice de département a fait des pieds et des mains pour que je renonce. En sortant de l’école, j’ai passé quelques années à écrire des scénario qui n’ont jamais abouti. Pour gagner ma vie, je faisais des interventions en Île-de-France, dans le cadre de « Lycéens au Cinéma » notamment, où, plutôt que de resservir une soupe théorique et universitaire, je demandais aux lycéens de me raconter l’histoire des films qu’ils avaient vu, et je leur donnais les outils dramaturgique (et le vocabulaire) qui leur permettaient de comprendre le sens des films.

Vous collaborez très souvent avec Vincent Poymiro. Ensemble vous avez créé et co-écrit Ainsi soient-ils et avez co-écrit En thérapie, deux séries qui cartonnent ! Comment vous êtes-vous rencontrés ? C’est important pour vous d’écrire à 4 mains (ou plus !) ?
Nous nous sommes rencontrés au lycée Montaigne à Bordeaux. Je débarquais du Maroc avec beaucoup d’envie et d’acnée. Je m’ennuyais en Terminale C, et je me suis fait, grâce au journal du lycée, le club théâtre, et le ciné-club, toute une bande d’amis plutôt littéraires dont Vincent faisait partie. Nous avons très vite fabriqué, à plusieurs, on devait être une dizaine, des spectacles de théâtre, des films en 16mm. Donc, il a été très naturel pour moi de passer à l’écriture à plusieurs dès la sortie de la FEMIS. Avec Vincent, il n’a jamais été besoin d’user des politesses d’usage, quand on ne connaît pas la personne avec qui on doit collaborer: on se connaissait très bien, on ne s’était jamais perdu de vue, on avait des références communes, des goûts communs.

Pour En thérapie, qui suit un psychanalyste et ses 5 patients, vous vous êtes réparti avec Vincent Poymiro et vos 3 autres co-scénaristes les personnages. Chacun de vous avait donc un patient attitré et a écrit l’ensemble des épisodes correspondant à sa thérapie. Est-ce une façon classique d’écrire une série ? Comment vous êtes-vous partagé vos personnages ?
Après avoir établi les bases de l’adaptation avec Eric Toledano et Olivier Nakache, nous avons réunis une équipe de scénaristes pour repasser sur les arches de la saison, et que chacun comprenne de quoi il était question dans chaque ligne narrative, et notamment celle du psychanalyste – que chacun allait avoir à prendre en charge. Puis nous avons laissé à nos trois jeunes collaborateurs le soin de choisir la ligne, donc le personnage, avec lequel ils se sentaient le plus d’affinité. Pauline Guéna, qui avait cotoyé pendant un an les agents de la PJ de Versailles pour une enquête litteraire au long cours (et qui donnera 18.3 aux Editions Denoël)  a choisi l’agent de la BRI, Adel Chibane. Nacim Mehtar, le plus jeune d’entre nous, a choisi l’adolescente Camille, et Alexandre Manneville a choisi Ariane, la chirurgienne. Nous, il nous est resté Damien et Léonora, le couple et Esther, la contrôleuse. Ce n’est pas comme cela que nous procédons habituellement lorsque nous montons un atelier d’écriture. Nous nous partageons le travail d’écriture par épisode, et non pas par personnage.

Poissonsexe, c’est une improbable comédie romantique désespérée. Comment êtes-vous arrivé sur ce projet ?Pouvez-vous nous dire quelques mots sur ce film ?
J’ai rencontré Olivier alors que j’écrivais la deuxième saison d’Ainsi-Soient-Ils. Il avait déjà une base avec tous les éléments que l’on retrouve dans le film: un laborantin dépressif dans un monde où les poissons disparaissent, le désir de paternité, des poissons zèbres, un axolote, les référence à Nietzshe, une jeune femme célibataire, un robot au service de l’armée (à l’époque, c’était un chien), une baleine échouée, etc… et surtout un ton très mélancolique. Tous ses éléments coexistaient dans un capharnaüm impressionnant (et impressionniste). Mon travail, avec Olivier, a consisté à tout détruire (à ce moment-là, ça lui a fait très peur) pour tout reconstruire de façon à ce que ça raconte une histoire.

Quels sont vos projets en cours ou à venir ? Avez-vous des envies pour le futur ?
Je suis, avec Vincent, sur la post-prod’ de deux séries, l’une pour Netflix, qui est une adaptation d’un roman d’Harlan Coben (Disparue à jamais), l’autre pour la RTS (La chance de ta vie). Pour la RTS, nous développons, avec Perpetual Soup, la boîte de production que nous avons créé avec Jérémy Sahel, une série teen fantastique : The Other Girl.

Merci David